Interview : Sharon Brill évoque sa nouvelle série, Emergences

Très influencée par la Nature, Sharon Brill nous dévoile sa nouvelle série Emergences. Présentées sur Artistics, ces œuvres hybrides, à mi-chemin entre sculpture et peinture, associent une réflexion formelle inédite à une sensibilité exacerbée pour la Nature. Les œuvres en volume de l’artiste s’enrichissent désormais de ces sculptures murales, où la porcelaine -associée à d’autres matériaux- semble mue par des forces invisibles. Poussée par une plus grande attention portée au caché, l’artiste part d’une surface plane pour rendre manifeste d’autres mouvements présents dans la Nature : non plus ceux de la mer (la source d’inspiration principale de ses précédentes créations) mais ceux plus invisibles encore, qui émergent des profondeurs de la terre.

Crevice 2 par Sharon Brill

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre dernière série « Emergences » ?

La création de cette série est inspirée de la combinaison de plusieurs choses : des formes des pierres et les façonnements des sols que j’ai assimilés grâce à l’observation de paysages marins et de dessins que j’ai réalisés dans le désert. D’une collection de fragments de porcelaine, œuvres qui se sont brisées à différents stades d’un procédé créatif et que j’ai conservées, et à la fois de la recherche d’un moyen de capturer le mouvement dans mes sculptures de manière condensée, et plus précisément dosée. Comme des occurrences latentes, ces éléments ont prospéré chez moi pendant un temps jusqu’à éclore et prendre forme.

A propos de cette série, vous déclariez : « Je recherche ce qui est caché dans la profondeur de la forme, au-delà du visible ». Telle que cette affirmation peut le laisse entendre, il y a-t-il une dimension métaphysique dans votre recherche ?

Il y a double sens à cette phrase : elle décrit d’abord la manière dont je travaille puisque je creuse un agglomérat de matière recomposé à partir de blocs, et je transforme la forme en ouvrant les couches externes de la matière qui constituent le périmètre à partir duquel des formes cachées se révèlent dans la profondeur de l’objet. Le processus advient essentiellement de manière intuitive et requiert une attention complète et une présence à l’objet. En considérant mon travail et mon contexte de vie, je comprends le sens métaphorique de cette recherche « en profondeur, au-delà du visible ». A partir de cette observation, j’ai pris conscience des connections qui s’opèrent dans mon subconscient et de la quête intérieure à laquelle je me livre mentalement. Elles prennent une expression dans la matière ; en ce sens, la recherche est métaphysique.

Inspirations de la série Emergences – Sharon Brill

Bien qu’abstrait, votre travail évoque le monde naturel. Pourriez-vous commencer par nous en dire plus sur votre propre relation à la Nature ? Comment vous inspire-t-elle ? Comment votre environnement direct influence-t-il votre travail ?

Je vis avec ma famille dans une petite ville du nord bordée à l’ouest par la côte méditerranéenne, et située à l’est au pied du Mont Carmel. La mer et la Nature en général me procurent un espace mental et un état de pleine présence aux choses qui sont essentiels dans ma création. Lorsque je suis dans la Nature, je me sens connectée à une essence profonde. Ce sentiment est troublé et il s’estompe lorsque je me situe dans un environnement urbain où mes sens sont submergés, comme si tout était trop – trop fort, trop bruyant, bien trop odorant… dans une agitation incessante et un excès de stimuli.

Demeurer dans la Nature, assister aux changements des paysages de la mer, des bois ou du désert me permet de retrouver la simplicité. Ce mouvement naturellement changeant m’offre de nouvelles perspectives quant au familier, à l’évident, et au monde émotionnel. De plus, j’absorbe les expériences sensorielles de ce contact avec la nature primitive et ses paysages, et ils sont inscrits dans la bibliothèque de mon intuition subconsciente. Plus tard, ils refont surface et se révèlent à travers les formes, les lignes et les mouvements de mon travail.

Vous travaillez la porcelaine exclusivement. Pourquoi avoir choisi ce matériau et qu’est-ce que vous lui préférez le plus conformément à votre travail et à ses qualités visuelles ?

Mon contact avec la porcelaine remonte au début de mon parcours sculptural, et c’est à ce moment que j’ai décidé de laisser le matériau se dévoiler et manifester ainsi le mouvement, les formes et les espaces qui les séparent à travers la lumière et les nuances.

Ce matériau blanc et sa teinte avaient un sens essentiel. J’adorais la porcelaine pour sa délicatesse, son élégance, son profond éclat, et la manière dont elle capture la lumière. Par conséquent, et en dépit de la difficulté de travailler ce matériau (il est fragile, il casse, il réduit…), ça en vaut la peine. Pour moi, son polissage final souligne son doux éclat de soie.

Dans certaines œuvres de la nouvelle série, la porcelaine est présente mais dissimulée, et elle se fond avec les autres matériaux par le biais d’une couverture uniforme. Mais les formes délicates et lisses que je retrouve avec la porcelaine plus qu’avec aucun autre matériau céramique me font la font choisir toujours.

Be-Formed par Sharon Brill

La série « Emergences » marque également un changement d’échelle et de forme. La plupart de vos sculptures céramiques étaient jusqu’à présent relativement petites et pouvaient tenir dans une main ou deux, alors que la série « Emergences » est composée de plus grandes sculptures murales. D’où provient ce changement ? Comment expliquez-vous la nature hybride de ces œuvres en partie picturales ?

Lorsque j’ai débuté cette série, j’avais l’idée de travailler sur un mur et de l’utiliser comme espace de référence, comme une surface derrière/dans laquelle la manifestation constante d’un mouvement prêt à éclore semblerait éclater à un certain moment. Mais bien entendu, si j’avais directement travaillé sur un mur, les œuvres seraient demeurées dans mon atelier. Par conséquent, j’ai commencé à travailler sur des panneaux de taille uniforme et relativement petite comme si c’était les morceaux d’un mur. A présent, je ressens le besoin de développer cette méthode, de travailler sur une surface plus grande, et d’affiner le dosage du mouvement, le volume et la profondeur de la zone d’éclosion dans sa relation avec les zones lisses qui l’entourent.

Je considère cette série davantage comme du bas-relief que comme de la peinture. J’aimerais que le spectateur puisse adopter le point de vue d’un oiseau et regarder les œuvres de haut. Pour les plus grandes œuvres sur lesquelles je travaille actuellement, il y a aura la possibilité de jouer avec les sens d’accrochage. Je suis fascinée par le changement d’associations et d’images que la rotation d’une œuvre à 90 ou 180 degrés fait surgir en nous lorsqu’on la regarde.

Pensez-vous que votre pratique va changer après la pandémie ?

Je souhaite rester ouverte aux changements, dans la manière dont je travaille – je préfère le voir comme un développement du processus que la créativité implique, et être attentive à tout ce qui veut se manifester – et à un niveau plus personnel. J’espère et j’aspire au développement, et je crois que ça fait partie de ma manière de vivre. J’espère que tout cela trouvera un écho dans mon travail.

Emergence 2 par Sharon Brill

Atelier de Sharon Brill

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